Willy Cabourdin
Aussi connu sous ses anciens pseudos, Misskathyx, ArchimondainJolyPunk ou Thybal-prince-des-chats, le Français Willy Cabourdin s’est installé il y a 7 ans à Bruxelles. C’est à l’Académie des Beaux-Arts de Saint-Josse et à son atelier à Ottignies qu’il poursuit son travail, dont se dégage un univers sombre inversement proportionnel à la personnalité douce de l’artiste.
Des techniques sur mesure
Au commencement était l’image. Celle des autres. Pages de magazines, archives, vieilles photos, faits divers qui marquent son esprit, ou juste sa rétine, déclenchent toute une histoire qui va se construire et se déconstruire, par strates. Après avoir isolé la photo choisie, Willy Cabourdin la soumet à une séries de (mauvais) traitements qui, loin de la camoufler, vont au contraire en révéler un sens caché, propre à sa lecture personnelle.
Recouvrir de peinture jusqu’à l’effacement, gratter, couvrir à nouveau, ajouter un personnage perché sur l’épaule, re-gratter, insérer un phylactère, un mot, un symbole, un signe graphique au feutre (qui trahit l’activité principale de Willy Cabourdin, graphiste et directeur artistique pour l’édition). Recouvrir le tout, re-re-gratter révéler et donner du sens, refaire l’histoire. Un processus créatif proche du cut-up de Ginsberg ou Burroughs. Par le transfert à la trichloréthylène, il obtient également des trames accidentées de l’image originale, les peint. Ré-applique le transfert, rectifie à la peinture. Recommence.
En cellule
Inspirés à la base par des sujets aussi variés que des portraits de taulards, les Twin Towers ou Chloë Sevigny, ses tableaux, panneaux de bois enduits, sont à considérer comme des “cellules”. Conçus en général en série, ces petits formats s’articulent les uns aux autres en se répondant. Mais peuvent tout aussi bien s’exiler et rejoindre une autre série à laquelle ils apporteront un nouvel éclairage, un autre sens narratif. Chargées de messages touchant à l’insconscient, mais parfois politiques, les cellules naissent d’un processus riche et libre, “comme David Lynch lorsqu’il monte ses films : en pratiquant la méditation, il lâche prise. Parfois la mécanique m’échappe, je laisse aller et une association d’idées en entraînant une autre, je raconte une histoire qui n’a plus rien à voir avec l’image originale”.
Modeste, il indique que “c’est aussi puéril que de noircir les dents d’un mannequin dans les pages d’un magazine”. Mais le spectateur trouve, dans cette manière organique et libre de réinterpréter l’actualité, un écho à ses propres fantasmes, à ses peurs secrètes. Et quel trouble… A.B